Portrait de praticien

Thierry Moreaux

Présentation

Thierry travaille depuis 10 ans à l’Hôpital ROBERT DEBRÉ de Paris. Cet établissement est un hôpital pédiatrique et une maternité.

Mais, tout d’abord, quelques mots sur le parcours atypique de Thierry : formé au métier de puériculteur et ensuite d’infirmier anesthésiste, il s’intéresse à la douleur des enfants, passe un D.U. Douleur, se forme à l’Hypnose, au Toucher-massage dans le cadre de son travail au sein du centre de la douleur. Pour clore ce beau cheminement professionnel, Thierry est aujourd’hui formateur auprès des soignants dans ces deux techniques complémentaires.

Thierry, ton parcours est dense, quelles ont été tes motivations pour suivre la formation Toucher-massage ?

Je travaille dans un centre d’évaluation et de traitement de la douleur à l’Hôpital Robert Debré. J’ai un poste transversal. Au quotidien, je rencontre des enfants et des bébés ayant des pathologies lourdes, douloureuses, des enfants en fin de vie qu’il faut accompagner. J’ai eu la chance de travailler en équipe avec Agnès Pasturel, aujourd’hui formatrice à l’IFJS, c’est elle qui m’a fait découvrir ce savoir-faire, elle m’a initié au Toucher-massage et donné le goût et l’envie d’investir sa pratique au quotidien pour mieux communiquer, soulager et accompagner ces enfants.

Que t’a apporté cette formation ?

Le Toucher-massage est aujourd’hui, pour moi, un outil supplémentaire dans la prise en charge globale de la personne. L’Hypnose est un moyen que j’utilise beaucoup aussi, mais qui ne convient pas à tout le monde. Il ne m’est pas possible, par exemple, de passer par le verbal avec certains enfants en situation de repli ou ayant des troubles de la communication. Le toucher me permet, d’une façon générale, de me sentir plus à l’aise dans ma façon d’être présent quelque soit l’enfant dont j’ai à m’occuper. A un niveau professionnel et personnel, la pratique du Toucher-massage m’apporte beaucoup de satisfaction, je me sens valorisé, «à ma place». J’ai ainsi pu prendre conscience de quelque chose d’essentiel : l’importance de l’attention à l’autre. Cette prise de conscience a donné une toute autre dimension à mon métier de soignant.

Aujourd’hui, quelle part occupe le Toucher-massage dans ton activité ?

Tout d’abord, je travaille toujours dans l’unité douleur en équipe transverse, à ce titre j’utilise le Toucher-massage au quotidien auprès des personnes en souffrance, les enfants et les femmes enceintes hospitalisées en service de maternité. Les soignants jouent le jeu, ils m’appellent ou m’interpellent quand je passe dans les services de soins. Ensuite, deux fois par semaine, j’anime des ateliers massage bébé au sein de la maternité. Les parents qui ont assisté à ces ateliers ou qui n’ont pas pu être présents ont ensuite la possibilité, une fois par mois, de revenir en externe pour continuer de se former, pour échanger avec moi et les autres parents. J’ai une maman qui actuellement est déjà revenue trois fois après son accouchement. Cela me permet de mettre en place un suivi très agréable pour tous. J’anime également une fois par mois des ateliers couples, j’apprends aux parents à se masser mutuellement dans le but de retrouver plus de lien entre le couple pendant la grossesse, de diminuer le stress, d’apporter du bienfait pour le bébé et donc semblerait diminuer le taux de prématurité. Cet atelier est aussi un lieu d’échanges entre moi et les autres couples. Enfin, je gère des séances de massage pour le personnel. Je vais deux fois par mois dans différents services (une fois par équipe) : en service de gastroentérologie et néphrologie, chirurgie, à la crèche, au pôle formation et bureau du personnel sur un créneau horaire allant de 14h à 16h30. Je demande à être installé avec ma chaise dans un endroit tranquille, un bureau en général et je reçois les personnes désireuses inscrites sur une liste faite par les cadres du service. J’ai mis en place un questionnaire qui me permet d’évaluer mes pratiques et de mesurer les bénéfices que cela apportent aux soignants. Les retours sont très positifs aussi bien des personnes ayant bénéficié des massages que des cadres qui semblent satisfaits du mieux être des soignants.

Le Toucher-massage occupe donc aujourd’hui une place de choix dans mon activité à l’hôpital, qui m’a finance cette formation longue. Mes projets ont été présentés à tous les cadres de l’hôpital avec le soutien de la direction des soins infirmiers. La directrice des soins est puéricultrice comme moi et convaincue des effets bénéfiques de cette pratique, elle m’incite et m’encourage à continuer. C’est très agréable pour moi d’avoir toute sa confiance. J’aimerais obtenir la même confiance des kinésithérapeutes, certains d’entre eux ont encore des peurs et se montrent peu coopérants et d’autant plus que nous pourrions travailler en collaboration. Aujourd’hui, pour répondre à toutes les demandes, j’aimerais être complètement détaché au poste de Toucher-massage ; mais pour l’instant il faut se rencontrer avec la direction des soins et le responsable des kinésithérapeutes et je pense qu’on a tous à y gagner de travailler ensemble… main dans la main !

Mon petit doigt m’a dit que tu participais à un projet de recherche, peux-tu nous en dire davantage ?

Oui, l’AP-HP met actuellement en place une politique de soins axée sur l’utilisation des techniques complémentaires. Pour cela, nous devons passer par l’évaluation de l’intérêt de ces techniques. Je suis, à ce titre, impliqué dans un travail sur l’évaluation des bénéfices de l’hypnose et du Toucher-massage chez les femmes en menace d’accouchement prématuré. Dans cette étude, nous chercherons à évaluer leur impact sur la douleur, l’anxiété, sur la diminution des contractions, ainsi que sur leur rôle dans le passage plus précoce du tocolytiques IV en traitement per os. Les patientes concernées seront des jeunes femmes entre 24 et 34 semaines de grossesse d’aménorrhée.

Puisque aujourd’hui tu bénéficies d’une belle expérience, quel conseil peux-tu donner aux soignants formés ?

Je reviens sur l’attention à l’autre qui, grâce au toucher, prend tout son sens : quelques minutes suffisent, un simple geste réconfortant, chaleureux qui va mobiliser les ressources des patientes, de l’enfant, lui apporter de l’énergie nécessaire pour mieux accepter l’hospitalisation ou avoir l’envie de se battre et de guérir.

Et si tu étais une bonne fée - je ne sais pas le masculin de fée - que ferais-tu pour ces mêmes soignants ?

Je ferais en sorte qu’ils prennent soin d’eux, qu’ils prennent le temps, qu’il se donnent les moyens de se masser entre eux, de se faire du bien pour pouvoir mieux s’occuper des autres. La nature nous a dotés de 2 mains, c’est aussi pour que nous puissions nous transmettre du bien-être, de la chaleur et de l’affection.

Ton implication fait chaud au coeur Thierry, et je crois que tu viens d’apprendre autre chose... ?

Oui, effectivement, je viens d’apprendre que j’ai été choisi pour être le représentant des techniques complémentaires à l’AP-HP, je ferai donc partie des comités, j’assisterai à toutes les réunions de suivi. Je pense être en bonne position pour faire avancer cette démarche, pour faire bouger les choses… l’avenir est plein d’espoir !